C'était en l'an dix-neuf cent deux Quand Jean d' la Providence de Dieu Ouvrit la porte sans carte blanche Son front était cuit et recuit Par le soleil et les soucis Son sac était lourd sur sa hanche Mais la mer du Nord s'engouffra Dans l' bar où tenions nos états : Y avait Machin, Chose et Langlois Y avait Frances, et c'était moi ! Nous étions tous les cinq à l'aise Dans le vieux bar de l'Irlandaise ! En ce temps-là, y avait Langlois Machin et Chose, l'Irlande et moi Le vent qui soufflait de la mer Nous a pris dans ses bras de fer Pour en emporter deux en douce Il ne resta dans l' cabaret Après qu'ils se furent taillés Car ils avaient l' diable à leurs trousses Que Langlois, moi et ce curieux Jean de la Providence de Dieu ! Y avait donc Jean, et Cætera Langlois, et la môme qu'était moi Langlois, très fauché, mit les voiles Pour retrouver sa bonne étoile Alors nous ne fûmes plus que deux Moi et la Providence de Dieu ! On m' nomme aussi "Saint-Jean bouche d'or" Me dit ce grand matelot du Nord Et quand je chante ma complainte Au petit jour, passé minuit Ici ou là, comme un défi Toutes les garces se croient des saintes ! Puis il disparut en chantant Autant en emporte le vent... Y avait Machin, Chose et Langlois Maintenant, il n'y avait plus que moi ! J'étais seule devant les bouteilles Elles m'offraient d'autres merveilles ! En souvenir de Jean, j'en bus deux Et tout l' reste à la grâce de Dieu ! Que sont devenus mes copains ? À dire vrai, je n'en sais plus rien L'Irlandaise a fermé boutique Machin et Chose ont disparu Dans le décor des inconnus C'est la faute au vent hystérique : Il fit entrer ce Jean de Dieu, Sa Providence et ses bons vœux ! Ah, les bistrots des ports de mer ! Lorsque le vent pleure en hiver Et vous prend pour toute la vie Avec ses orgues de Barbarie ! C'était en l'an dix-neuf cent deux Au Rendez-vous des amoureux