À l'autre bout d' la rue, y êtes-vous jamais allés ? Y a un kiosque à musique où personne ne vient jouer Quand il pleut, les passants, un court instant, s'y arrêtent Les gamins tournent autour avec leurs planches à roulettes C'est un temple bizarre, une pagode oubliée Au cœur du tintamarre des autos, des trolleys Voisines souvent rencontrées Si fugaces, si effacées Marchant à côté de la vie Je pense à vous quand tout est gris Vous êtes ce kiosque désert Cette maison des courants d'air Ouverte de tous les côtés Et chacun vient s'y abriter On passe sans faire attention Et sans vous poser de questions On repose sur votre corps Vous faites partie du décor Vos désirs de vous inconnus Vous ouvrez au premier venu Vous êtes un lieu de rendez-vous Mais l'amoureuse, ce n'est pas vous On fête l'anniversaire d'une vieille révolution Au kiosque on a offert un beau collier de lampions Un homme fait des discours sur la paix et sur la guerre Approchez, approchez, voilà la r'vue militaire Une triste fanfare fait trembler les poteaux Et le vieux toit bizarre où flottent des drapeaux Voisines souvent rencontrées Silencieuses et résignées Et qui subissent leur pouvoir Je pense à vous quand tout est noir Vous êtes ce kiosque perdu Cette maison qui n'en peut plus Ouverte de tous les côtés Mais parfois prête à éclater Tout ce qu'on décide pour vous Vos peurs, vos envies, vos dégoûts Et ces passants dans votre vie Que vous n'avez jamais choisis Nous sommes ce kiosque oublié Où jamais nous n'avons joué Au grand bal de l'égalité Sommes rarement invitées Cette fanfare du printemps Cette musique qui attend Loin des corsets, loin des cuisines Elle naîtrait de vos poitrines Si vous vouliez, voisines Si vous vouliez, voisine