Dans une rue de Santiago Non loin du port Je connais un petit bistrot Qui fait de l'or C'est le rendez-vous cosmopolite Des marins, des gauchos, des chercheurs d'or Y a d' la fumée partout, aussi l'on n' peut rien voir Derrière la fumée, y a pourtant le comptoir Près du vieux comptoir, y a un piano Devant l' piano, y a Ricardo Au café du Petit Pélican On ne sait depuis quand Dans cet air suffocant Il tape, tape sur son piano Il tape, tape de beaux mambos Pourtant ce n'est pas pour ce croquant Que tous les trafiquants Viennent au Pélican Mais pour la fille qui sert à boire La jolie fille qu'est au comptoir Un soir, il y avait là le roi d' la navaja Pedro le Balafré avec sa jambe de bois Jo le Bagarreur dit La Grimace Et Billy le Loucheur, pêcheur d'anchois La fille monte alors sur le bord du comptoir Fait voltiger sa robe autour de ses bas noirs Et voulant jouer avec le feu Jette une fleur aux amoureux Au café du Petit Pélican Les poings sont éloquents Ce fut un beau boucan On cogne, on frappe, sauf Ricardo Qui tape, tape sur son piano Toute la nuit, on vit les attaquants Soufflant et suffocant Pour les yeux provocants De la belle fille qui sert à boire La jolie fille qu'est au comptoir Billy chargeait Un oeil sur le Balafré L'autre prunelle Sur elle Jo grimaçait Mais au piano, Ricardo Jouait l' grand air de Figaro Au matin, dans le P'tit Pélican Sont morts tous les croquants Gauchos et trafiquants Nul n'en réchappe sauf Ricardo Qui tape, tape sur son piano Alors la belle a fait "Bravo ! J' te s'rai fidèle, mon Ricardo Et pour qu' tu sois plus éloquent Fermons les volets du Petit Pélican"