Aux matins frêles des lacs de neige, Aux matins froids aux reflets grêges, Aux soleils, frissons de l'hiver, Je suis la louve solitaire. J'allais sur mes terrains de guerre, Cachée, chassant sur mes chemins. Soudain, sur un socle de pierre, Il m'est apparu un grand chien Et moi la louve, moi la reine, Et moi la faim, et moi l'instinct, J'ai posé ma tête de fauve Dans la fourrure du grand chien Et le chien, au midi frileux, A suivi ma piste et ma chasse Et j'ai cru voir dedans ses yeux Le reflet d'un éclair qui passe. Il faut croire qu'il était fou Quand il me suivit dans la neige. N'étant qu'un chien, il se crut loup Et prit sa patte dans mon piège. Mais moi la louve, moi la reine Et moi la faim, et moi l'instinct, J'ai ouvert le piège de fer Et mordu sa cuisse de chien Mais au nid, au doux crépuscule Entre chien et loup, au palais, Couchés sur notre lit d'épines, Moi, la louve, j'ai léché ses plaies. Aux matins frêles des lacs de neige, Aux matins froids aux reflets grèges, Aux soleils, frissons de l'hiver, Je reste la louve solitaire, Solitaire, solitaire, solitaire...