Quand elle lui disait "Je t'aime" Il prenait un air surpris C'était l'évidence même À quoi bon l'eût-elle dit ? Quand elle insistait "Regarde Suis-je vraiment à ton goût ?" À son expression hagarde On l'aurait pris pour un fou Et quand elle le secouait Il lâchait d'un air distrait "Flou, je te vois flou Je vois comme un brouillard partout Autour de tes yeux, de tes joues Et ton corps qui est en dessous Je ne le vois plus du tout Flou, je te vois flou Tu peux bien te pendre à mon cou Tu peux m'arracher des mots doux Tu peux grimper sur mes genoux Je te vois flou" Elle lui disait "Ça m'inquiète Tu me voyais bien pourtant Il te faudrait des lunettes Tu pourrais de temps en temps Me dire que je suis belle" Mais ses yeux étaient restés Tout au fond de ses jumelles Où il était enlisé Car en face il regardait Une autre qui s'en doutait "Flou, tu me vois flou Et moi qui t'aime et qui l'avoue Je ris, je pleure, tu t'en fous Mais de la fille qui se joue Tu connais tout, tout, tout Flou, tu me vois flou Je peux me tatouer partout Je peux me teindre en acajou Je peux te faire un charme fou Tu me vois flou" Un jour, pour que ça lui passe Elle partit s'installer À la fenêtre d'en face Où il la vit s'exposer Mais sans plus la reconnaître Alors il la découvrit Cramponné à sa fenêtre Il la guettait jour et nuit Mais c'est elle qui pensa En l'apercevant là-bas "Flou, je te vois flou Et moi qui croyais bien que nous Vivions un amour à genoux Tu es un homme comme tous Ceux que je vois partout Flou, je te vois flou Y a quelque chose là-dessous Qui me chagrine un peu, beaucoup Où est passé mon amour fou ? Je le vois flou" Flou, on se voit flou Mais pourquoi se rouer de coups ? Pourquoi hurler comme des loups Si tu dis que ces jeux de fous Ne changent rien pour nous ? Flou, on se verra flou Et quand je ferai les yeux doux Toi, tu ne seras pas jaloux On pourra vivre tranquillou Un amour flou, flou, flou Flou et voilà tout