J'ai jamais rien dit, jamais bravé la moindre loi Pas le plus petit carreau brisé, le moindre éclat de voix J'ai vécu peinard dans mon pinard et mes pantouffles Ce succédané de liberté où l'on étouffe J'ai fermé ma gueule et ma fenêtre et mes idées J'ai été le seul à me connaître, à me voir me rider Mais je n'en peux plus de m'être tu dans ce vacarme Dans la fausse paix du monde vrai des marchands d'armes Et c'est moi, moi le lâche Et c'est moi qui me fâche Et c'est moi qui m'arrache et qui vous secoue Moi l'intrus, l'anonyme Le cocu, la victime Je n' veux plus tendre l'autre joue Bouge, mon pauvre cœur usé d'avoir battu pour rien Les années solitaires, les années sans lumière, c'est loin Rouge, le ciel est rouge et nous promet de beaux matins L'horizon est couleur de colère Qu'est-ce que je foutais dans mon silence et dans ma peur Enterré vivant, tenant autant de place qu'une erreur ? Qu'est-ce que je foutais, moi toujours prêt dans le tumulte À courber le dos, à faire le beau sous les insultes ? II en est bien sûr de plus malins et de plus forts Des briseurs de sceptre, des païens qui traquent le veau d'or Prêts à tout casser pour renverser les dictatures Et les remplacer souvent par d'autres dictatures Mais c'est moi, moi le lâche Mais c'est moi qui me fâche Et c'est moi qui m'arrache et qui vous secoue Moi l'intrus, l'anonyme Le cocu, la victime Je n' veux plus tendre l'autre joue Bouge, ma pauvre vie laissée pour compte si longtemps Et si c'est éphémère, ne te prive pas d'air pour autant Rouge, le ciel est rouge et nous promet de beaux printemps L'avenir est couleur de colère ! De colère !